DEVELOPPEMENT PSYCHOMOTEUR
DE 0 à 3 ANS, BEBE PENSE AVEC SON CORPS
Le bébé naît sans psychisme construit. C'est à partir de ses expériences corporelles, psychiques et de ses rapports avec sa mère et ses proches qu'il va peu à peu mener de front et nourrir l'un par l'autre son développement physique et psychique. Et les adultes, sa maman bien sûr, sont là pour l'en garantir.
Soixante-treize ! C’est le total des réflexes jusqu'ici dénombrés chez un petit d'homme à la naissance.
A soixante-treize stimulations précises, votre bébé répond par un mouvement involontaire donné, toujours le même. Car son système nerveux, contrairement à celui des petits d'animaux, est loin d'être terminé : son cerveau doublera de volume en un an, ses neurones ne seront pas en place avant deux ans, celui du cervelet avant trois ans. En attendant, les circuits-réflexes, préprogrammés, lui sont indispensables...pour survivre, comme le réflexe de succion quand il tète aussitôt ce que vous lui mettez en bouche, ou celui de l'agrippement quand il serre très fortement votre doigt. Les réflexes lui permettent aussi de signaler sa fragilité, par exemple avec le réflexe de Moro : à un coup frappé sur la table où il est allongé, le bébé réagit en écartant les bras, en pleurant, puis en rassemblant ses bras vers lui.
Quelques réflexes montrent également ce que bébé sera capable de faire, bien plus tard. Il trottine ainsi obligeamment pendant deux ou trois pas lorsqu'on le soutient debout. Six de ces soixante-treize réflexes sont d'ailleurs utilisés systématiquement par le pédiatre pour vérifier dès la naissance, l'intégrité physique du nouveau-né. La plupart disparaîtront dans les trois mois, quelques-uns évolueront avec le développement et les nouveaux besoins de l'enfant.
UN ENSEMBLE COMPLEXE, SANS FRONTIERE ENTRE PHYSIQUE ET PSYCHIQUE
Cette immaturité humaine, si spécifique, permet au nourrisson d'accéder lui-même et petit à petit, à la pensée et aux sentiments, à partir de son patrimoine physique, bien sûr, mais aussi à partir de ses expériences, de ses mouvements, de ses sensations bonnes ou mauvaises, de ses interactions avec l'entourage. Un bébé est un tout qui apprend à penser peu à peu avec son corps, avec sa vie et qui ne se différencie pas encore de sa mère. Ses niveaux d'organisation, ses tensions, ses sensations, ses émotions, tout cela forme un ensemble complexe, sans frontière nette entre physique et psychique, une réalité globale dont les mots "développement psychomoteur" rendent bien compte.
Au début, il ne peut faire de gestes volontaires, puis ses muscles se renforcent
Les étapes de ce développement sont identiques pour tous les bébés. A quelques mois près, ils apprendront tous et dans le même ordre à se retourner, à s'asseoir, à marcher, à parler, etc. mais chaque enfant le fera avec ses propres dispositions, issues de ses parents et de son histoire prénatale tout autant que de ses expériences ans tel milieu, de ses échanges avec telles personnes, ouvrant ainsi à l'infini richesse et diversité des hommes.
Le bébé est bien "équipé" pour les énormes progrès qu'il va accomplir. Ses sens fonctionnent et dès sa première semaine par exemple, il tournera sa tête de préférence vers un tampon imbibé de l'odeur de sa mère.
Sa vue mettra quelques mois à s'affiner, mais il peut déjà suivre des yeux quelques secondes un visage qui se déplace. Il entend, il goûte, il sent.
Son tonus musculaire, en revanche, est bien diffèrent du nôtre, et justifié par son incapacité à accomplir des gestes volontaire. Les muscles "fléchisseurs" de ses bras et jambes sont hypertendus, les muscles correspondants "extenseurs" n'ont pas encore de force. Dépliez sa main, allongez sa jambe, il reviendra, bien vite à sa position initiale, en grenouille, le poing fermé. Les muscles de son dos sont plus équilibrés, mais pas encore très toniques, et son dos mou s'enroule vers l'avant. Sa nuque et très faible ; non soutenue sa tête ballotte.
Dans une progression qui part toujours de la tête et du tronc pour finir par les extrémités, ses muscles vont se renforcer, les tensions vont s'équilibrer, entre fléchisseurs et extenseurs. Ainsi, le bébé va apprendre à soulever la tête, à se retourner dans son lit (à 3-4 mois), puis son dos sera suffisamment solide pour qu'il se tienne assis (à 6-8 mois). a ce moment - capital - , une nouvelle partie du monde lui est offerte. Il multiplie les expériences, son champs de vision est élargi et ses bras sont libérés grâce à la station verticale. Il réussira bientôt à attraper entre pouce et index de petits objets, car il plie et déplie désormais les doigts à volonté. Un autre monde de proposera encore à lui quand il commencera à se déplacer, puis à marcher vers 14 mois. Quel parcours!
Ses premières images mentales sont liées à ses sensations Parallèlement et étroitement intriqués se sont poursuivis ses développements psychique (reconnaître, mémoriser, classer les informations, percevoir les limites de son corps et sa permanence) et affectif (émotions, sentiments..). A sa naissance, le bébé sait très bien ce qui lui fait du bien et du mal, et il ressent pleinement les situations de détente heureuse ou de tension pénible. il vous suffit de regarder son visage béat après la tétée ou ses grimaces quand il a des coliques. Ses premières images mentales de bon, de plénitude ou de manque et de souffrance s'organisent à partir de ces sensations, de ces tensions. (tout notre vie, l'humeur et l'état mental resteront liés à nos tensions physiques.) Les réactions de l'entourage jouent un très grand rôle dans la cohérence de cette organisation. En reconnaissant les états de son bébé, en les soulignant par des paroles, en répondant à ses besoins, la mère (ou le père!) permet au bébé d'établir des liens entre son "dedans" et le dehors, à délimiter peu à peu ce qui est lui, à reconnaître ses sensations. La mère, les parents sont le support de ces bonnes images, ils nourrissent, soulagent, protègent. Ils le sont aussi des mauvaises images, parce que, aussi bon parents soient-ils, ils font attendre, ne répondent pas à tous les besoins, font parfois mal...La dualité de la bonne fée et de la sorcière, de la dame Tartine et de l'ogre, du bon et du méchant se met en place à partir d'eux pour durer toute la vie.
Le dos donne l'axe à partir duquel se structure la pensée
Le bébé prend conscience de son corps à travers son tonus musculaire, ses moments de détente accordés à l'enroulement réflexe de son corps - dos courbé, membres repliés vers soi -, position qui lui donnera lentement la sensation de moi. Déjà, comme à l'âge adulte, le dos, la colonne vertébrale donnent l'axe à partir duquel se structure la pensée dans la symétrie : le devant, le derrière, le haut, le bas, la gauche, la droite. C'est le dos qui soutient la tête ou siègent la vue, l'odorat, l'ouïe, le goût.. Et quand nous en avons "plein le dos", c'est ici que nous avons mal. Le tout petit a donc grand besoin d'avoir la nuque soutenue pour utiliser ses sens et entrer en relation par le regard (c'est une des raisons pour lesquelles les enfants des mères dépressives qui tiennent mal leur bébé ne se développent pas bien). il lui faut conserver une nuque souple, sans tension pour pouvoir retrouver son enroulement réflexe, récupérateur et constructeur du "moi". Au grand bond en avant des six mois, l'enfant, le dos bien droit, installé autour de son axe porteur et psychique, peut se séparer de sa mère. Il n'a plus besoin d'être tenu ni soutenu, et il commence à être lui dans ce face à face nouveau avec elle. A la même époque, il commence à différencier le dedans et le dehors, ce qui est lui, son corps, ce qui est objet extérieur.
Certains bébés sont plus toniques, plus vif que d'autres. nul besoin de stimuler leur motricité, de les mettre tôt sur leurs pieds, de leurs fournir pousseurs ou trotteurs. Curieux d'expériences, ils s'en délecteront, mais pour acquérir la confiance en eux, la certitude intérieure où se ressourceront plus tard leurs capacités d'attention et de stabilité, ils doivent aller à leur rythme, faire et refaire leurs expériences tout seuls et pas trop vite.
D'autres bébés, au contraire, sont hypotoniques, un peu mous. Le développement sera aidé si, par exemple, vous mettez des coussins dans le dos d'un enfant de 8 mois qui se tient mal assis. Il aura ainsi la possibilité d'exercer ses mains, selon son rythme. Car chaque enfant a le sien, avec ses accélérations et ses arrêts, les écarts étant parfois considérables de l'un à l'autre. Les pédiatres connaissent bien ce qui est le signe de déficit et qui relève d'une lenteur provisoire. Soyez donc attentifs, mais surtout patients!
Une fois la marche acquise, le petit enfant progresse dans toutes les directions. Il parle, mange seul (plus ou moins bien!) va sur son pot. Vers 2 ans, il peut monter et descendre quelques marches debout, sauter à pieds joints, regarder derrière lui qui arrive tout en tenant sa timbale, il commence à crayonner, avec une prise assez précise pour diriger - un peu - le trait. Vers trois ans seulement, il peut se tenir en équilibre sur un pied. Il sait alors bien qui il est, garçon ou fille. Ses classifications abstraites sont déjà élaborées. Il explore les relations de cause à effet. Il sait ce et ceux qu'il aime (et le dit clairement!). Sa vie imaginative s'est enrichie de tout un folklore familial, culturel. Déjà, corps opérationnel, schéma corporel intégré, il est installé dans ce mouvement de va-et-vient : tension/détente ; ouverture, activité, expériences, émotions/repos, repli sur soi pour classifier, ressentir, se ressourcer.